Episode 18 – prévention des morsures

Dans cet épisode, on va parler des morsures de chiens sur humains. 

Dans cet épisode, je vais croiser plusieurs données. Principalement celles du rapport de l’ANSES relatif à l’évaluation du risque de morsure par les chiens sorti en octobre 2020 qui totalise 230 pages sur les facteurs à considérer pour prévenir des morsures. Vous pouvez aller le lire en entier ou regarder dans le sommaire les points spécifiques qui vous intéressent. J’introduirai aussi plusieurs études dont vous aurez les références en bas de page si vous voulez les lire 😉

La définition de la morsure retenue dans le rapport de l’ANSES (Guy et al. 2001b, Messam et al. 2012) est « prise en gueule avec contact des dents sur une personne que la peau soit couverte (vêtements et accessoires en contact avec le corps) ou non, portant atteinte à l’intégrité physique de cette personne ». Attention, on ne parle évidemment pas du mordillement des chiots.

Ils ont divisé leurs données en facteurs de risque d’émission et d’exposition des morsures.  

Dans les facteurs d’émission d’une morsure, on parle donc de celui qui peut émettre la morsure, le chien, on retrouve : 

‐ les caractéristiques de l’individu chien

‐ le bien-être et la santé du chien

‐ l’environnement du chien : les modalités d’interaction et les relations humains-chien. 

Dans les caractéristiques de l’individu le premier point évoqué est la race avec la conclusion que le risque de morsure ne peut se fonder de manière fiable sur la seule race ou le type racial du chien. On connaît tous la réglementation actuelle sur les « chiens dangereux » qui repose sur des races et des morphos spécifiques. Je ne discuterais pas ici de l’incohérence de cette réglementation. D’ailleurs je tiens à souligner que, souvent les propriétaires de races catégorisées vont taper sur les petits chiens ou sur ce fameux rapport qui montre que le labrador est la race qui mord le plus. Mais, quel est l’intérêt de se focaliser sur une race ? Je tiens à rappeler qu’évidemment, il y a des patterns moteurs dans les races mais que tout doit se penser en terme d’individu. Alors oui, certains typé staff vont mordre, parce qu’ils auront subi une éducation coercitive et qu’à une marge de liberté ils vont vriller et que bah oui une mâchoire de staff ça fait plus mal qu’une mâchoire de mini chiens, j’ai un chien avec une mâchoire de staff donc je peux vous le dire. Et de l’autre côté on a des petits chiens terrorisés qu’on traite comme des peluches qui vont finir par mordre parce que personne ne voit leurs signaux de stress. Et évidemment, ce fameux labrador meilleur ami des enfants qu’on laisse sans surveillance avec des enfants qui jouent au poney avec lui, qui au bout d’un moment va juste dire qu’il en a plus que sa claque qu’on ne le respecte pas. Il faut aussi savoir que toutes les morsures ne sont pas déclarées parce que les gens ont peur pour leur chien ou parce que, pour certains, ce n’est pas grave. Là aussi, on ne fera pas de débat mais sachez que pointez une race plus qu’une autre ça ne sert à rien, il faut voir ce que subit l’individu qui va être amené à mordre. Dans le rapport de l’ANSES et dans plusieurs études que j’ai lues, on voit clairement que les races identifiées comme plus à risque de morsure vont varier entre les études et entre les pays. De fait, la recherche scientifique ne conclut pas qu’une race ou un type de morpho va être plus à risque de mordre qu’un autre et de fait, les lois sur les chiens dits dangereux ne sont pas réellement efficaces sur la réduction des morsures (American Veterinary Medical Association, National Canine Research Council, Animal and Society Institute). Dans les facteurs liés à l’individu on a aussi le tempérament, là aussi on n’a pas de consensus clair sur des paramètres de tempérament susceptibles d’influencer l’agressivité canine. On a un effet du sexe avec les mâles statistiquement plus mordeurs mais pas du statut reproducteur (pas de conclusion claire sur les effets d’un chien castré vs entier). Au niveau de l’âge des chiens, les chiens âgés de 1 à 7 ans seraient plus à risque (on est d’accord 1 à 7 ans c’est une énorme marge). Et évidemment, les conditions de développement et socialisation. J’en ai parlé dans l’épisode précédent de l’importance de faire une socia et familiarisation progressive et positive. On comprend bien qu’un chien qui n’aura rien vu ou qui aura fait des associations négatives sera plus à risque de mordre. C’est pour ça que c’est vraiment important de bien sélectionner l’élevage dans lequel vous adoptez votre chien et de faire les choses le mieux possible quand vous adoptez votre chien. Et si vous adoptez un chien en refuge, de prendre le temps de comprendre ce qu’il aime et ce qui le fait flipper pour éviter toute situation dans laquelle il serait mal à l’aise.

Ensuite, on a le bien-être et la santé du chien. Évidemment les atteintes au bien-être et frustration seraient des facteurs possibles d’émission d’une morsure. Un chien dont les besoins physiques, cognitifs et sociaux ne sont pas comblés a évidemment plus de risque de mordre. C’est pour ça qu’il est vraiment important de pouvoir répondre à ses besoins pour que lui soit bien dans ses pattes mais aussi de sécuriser au maximum. Ensuite, on a la santé dans laquelle on retrouve les affections douloureuses qui peuvent conduire à des réactions agressives et aussi les dysfonctionnements cognitifs, émotionnels et troubles du comportement. Là vous devez consulter votre véto impérativement et vous orientés vers des professions spécialisées. Typiquement le chien qui va mordre quand on lui met le harnais parce que ça lui fait mal au dos, il faut y faire attention. L’apprentissage de la muselière peut d’ailleurs être très utile si un jour vous devez faire des soins d’urgence à votre chien pour éviter de vous faire arracher le bras. Qui n’a jamais eu envie d’étriper un médecin qui appuie sur l’endroit douloureux en vous disant « et là ça fait mal ? » bah c’est le même principe.

Et enfin, on a les interactions. Comme je l’ai dit dans plusieurs épisodes, il est important de maximiser les interactions positives et limiter les interactions négatives pour avoir une relation de confiance mais aussi limiter le risque de se faire bouffer parce que votre chien en a sa claque que vous lui mettiez des acoups ou des coups de pieds. Il y a également tout ce qui va être interactions qui ne visent pas à violenter le chien psychologiquement et/ou physiquement mais qui sont chiantes pour lui. On en parlera dans le prochain épisode en détails mais typiquement le chien qui se fait embêter par les enfants toute la journée, mais aussi le chien qui se fait tripoter par tout le monde dans la rue, ou le chien qui vous a déjà dit plusieurs fois qu’il n’apprécie pas les caresses dans telle situation et vous insistez.

Dans les facteurs d’émission il y a aussi les capacités du chien à reconnaître les signaux humains. Oui, les chiens sont doués pour nous comprendre mais ça peut être compromis s’ils n’ont pas vu d’humains pendant leur période sensible et/ou qu’on communique comme un bourrin avec lui c’est-à-dire de façon incohérente et coercitive. Et on aura aussi les méthodes d’éducation. Je vous renvoie aux épisodes 1 et 2 sur les méthodes d’éducation où je vous ai parlé des études mettant en avant que les méthodes coercitives peuvent compromettre le bien-être du chien, la relation avec lui mais aussi provoquer des comportements agressifs. Pensez de façon claire : plus un chien est contraint plus il a le risque d’exploser, plus le cadre est construit avec lui et sa marge de contrôle, mieux il gèrera les situations qui le stressent.

Ensuite, ils parlent des facteurs d’exposition. Ils définissent l’exposition comme « le contact de la population cible avec le danger. L’appréciation de l’exposition est un processus permettant de décrire l’intensité, la fréquence et la durée de contact d’un individu avec le danger considéré. Elle consiste également à décrire les mécanismes nécessaires pour que l’individu soit exposé au danger ». Ils précisent que tout humain est potentiellement exposé au risque de morsure, s’il entre en contact avec un chien, que ce contact soit recherché ou non, que le chien lui soit connu ou non. On peut tous se faire mordre par notre chien mais aussi le chien d’amis, le chien d’inconnus dans la rue, c’est un fait et c’est pour ça qu’il est important de ne pas aller tripoter les chiens qu’on connaît et ne connaît pas, de savoir reconnaître les signaux de stress et d’apprendre à communiquer de façon claire et cohérente avec les chiens. Dans les facteurs d’exposition on a donc l’âge avec des morsures létales plutôt sur les enfants ; non létales plutôt sur les enfants mais sans conclusion claire. C’est malheureusement plus logique, on parlera en détails dans le prochain épisode de la gestion des interactions enfants-chiens. On a aussi un effet du genre avec plutôt des hommes, pareil chez les enfants plutôt des garçons. Évidemment les professions en contact avec des chiens vont être plus exposées à des morsures, vu qu’ils vont voir les chiens dans des situations où ils ne sont pas très à l’aise. Il y a aussi le lieu d’exposition où l’espace privé est le lieu où sont décrites la majorité des morsures d’enfants en bas âge et d’adultes propriétaires des chiens impliqués. Logique. L’espace public est le lieu où sont décrites la majorité des morsures des personnes non familières du chien mordeur. Logique aussi. Le mode de vie et la proximité vont aussi avoir un effet, il est important de ne pas avoir trop de restriction mais un cadre, d’avoir une certaine proximité mais chacun son espace. Dans ces facteurs, on a aussi la difficulté pour l’humain de reconnaître des signaux émis par le chien et l’émission par l’humain de signaux inappropriés. Donc d’un côté les humains qui ne vont pas observer et/ou comprendre les signaux des chiens. Pour ça, j’en ai parlé sur 2 épisodes sur les signaux d’apaisement, je vous invite à les écouter pour mieux comprendre. Pour les signaux émis par les humains, encore une fois on est dans la nécessité d’une communication claire et cohérente privilégiant les interactions positives. Et enfin, les chiens éduqués pour la défense et l’attaque. Ce n’est pas moi qui le dit c’est le rapport, je sais qu’il y a des débats sur les pratiques de ce type mais on peut facilement comprendre que si dans les méthodes d’apprentissage on est dans le coercitif, ça va suivre le petit fil de « on a une bombe à retardement à qui on a en plus appris à se déclencher ».

On a forcément un lien entre facteurs d’émission et d’exposition puisque tout ça va dépendre de l’interaction entre l’individu, son milieu et l’humain qui se fait mordre.

On reprend vite fait : Les facteurs vont donc plutôt concerner un individu (sexe, ^âge, conditions de développement, bien-être, santé mentale et physique) et le type d’interactions auxquelles il est confronté (relation à l’humain et méthodes d’éducation). Et de l’autre côté les facteurs liés à la personne exposée (âge, genre, profession, le lieu de morsure, le mode de vie du chien, la façon de communiquer et la compréhension entre l’humain et le chien). Les facteurs vont reposer sur le respect des besoins du chien, de ses attentes et de son bien-être et évidemment être attentif à la communication des chiens. Je vous renvoie aux épisodes 5 et 6 sur les signaux d’apaisement et l’échelle d’agressivité. On a aussi déjà parlé dans l’épisode 1 de l’effet négatif de l’éducation coercitive sur le bien-être du chien ainsi que sur la relation humain-chien. De fait, si on regarde les facteurs à prendre en compte, utiliser ce type de méthode est un facteur impactant le risque de morsure.

Pour conclure, je vous dirais que lorsque je dis de voir un éduc avant que ça part en couilles et d’observer votre chien ce n’est pas pour rien. La morsure c’est évidemment des conséquences physiques pour l’humain mordu, des conséquences pour le chien (euthanasie par exemple) mais surtout des conséquences pour votre relation avec votre chien. Plus vous gérez en amont, moins vous aurez de risque de morsure. Alors évidemment, il y a aussi une part de génétique et de traumas pendant la période sensible mais globalement, vous pouvez gérer au max pour que ça se passe le mieux possible. Et surtout si votre chien mord, ne rentrez pas dans un jeu du plus fort car vous allez perdre, voyez rapidos un éduc en méthodes bienveillantes et voyez avec lui les solutions : ça peut être de la rééducation mais aussi du replacement (si votre chien mord car vous n’arrivez pas à répondre à ses besoins par exemple).

Il est vraiment important de connaître votre chien, d’identifier les situations qui stressent votre chien, gérer l’environnement, toujours laisser la possibilité que le chien évite et contrôle ses interactions.

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Sur ce je vous souhaite une bonne journée et des caresses consenties à vos toutous

Références

AVIS et RAPPORT de l’Anses relatif à l’évaluation du risque de morsure par les chiens. (2020, octobre 30). Anses – Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. https://www.anses.fr/fr/content/avis-et-rapport-de-lanses-relatif-%C3%A0-l%C3%A9valuation-du-risque-de-morsure-par-les-chiens

Gilbert, C., & Deputte, B. (2015). Mieux vaut prévenir que guérir : Comment sécuriser la relation Homme-Chien? Bulletin de l’Académie Vétérinaire de France.

Williams, E. J., & Blackwell, E. (2019). Managing the Risk of Aggressive Dog Behavior : Investigating the Influence of Owner Threat and Efficacy Perceptions. Risk Analysis39(11), 2528‑2542. https://doi.org/10.1111/risa.13336

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